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En Chine, La maison, I

La maison, I

Les maisons chinoises, même les plus opulentes s'élèvent rarement au-dessus du rez-de-chaussée; elles se composent d'une suite de bâtiments séparés par des cours, et affectés chacun à un usage particulier. On construit le plus souvent sans fondations ni cave, sur de larges bases en moellons qui reposent immédiatement sur le sol; les murailles minces, hautes de 20 à 25 pieds, sont faites de briques d'une couleur cendrée: la brique vaut en Chine, suivant son volume, de 18 à 45 fr. le mille. Les tuiles qui recouvrent la toiture sont creuses comme des gouttières; on les pose d'abord sur le côté bombé en rangées longitudinales contiguës, puis les rainures plus ou moins larges que les rangées laissent entre elles, et qui pourraient donner passage à la pluie, sont recouvertes par d'autres tuiles placées en sens inverse; puis tous les matériaux disparaissent sous les peintures brillantes et les ornements. Les chevrons des toits dépassent toujours l'aplomb des murs et les dessous de ces avancements sont le prétexte de délicieuses décorations. C'est aux poutrelles entrecroisées sous ces auvents que l'on suspend les grosses lanternes ovoïdes sur lesquelles est écrit d'ordinaire le nom du propriétaire de la maison. Montons quelques marches, et pénétrons dans la salle de réception, après avoir admiré la superbe guirlande de feuillage et de fruits d'or qui encadre la porte jusqu'à mi-hauteur des chambranles; une légère balustrade ferme seule le seuil, et lorsqu'on l'a franchi, on se trouve dans un étroit péristyle qui communique directement avec le salon et semble en faire partie. Si vous êtes un visiteur de condition inférieure, vous ne dépasserez pas ce péristyle et c'est à genoux que vous devrez adresser la parole au maître du lieu qui, assis sur le banc d'honneur au fond de l'appartement, ne vous prêtera qu'une attention distraite et dédaigneuse; mais si vous êtes mandarin comme lui, il agira tout autrement: il se précipitera à votre rencontre, vous accablera de politesses et vous entraînera avec les marques de la plus vive affection vers le banc d'honneur, où il vous fera asseoir à sa gauche. On servira aussitôt le thé, les sucreries, les pipes, et tandis que l'hôte vous demandera avec le plus profond intérêt des nouvelles de toute votre glorieuse famille, vous pourrez examiner la salle de réception. Elle est assez vaste, éclairée sobrement par des châssis découpés à jour, où s'enchassera l'hiver, la coquille transparente d'un mollusque, «le placuna.» Un parfum délicat y flotte, qui émane des bois précieux dans lesquels sont taillés les meubles. Autour des murailles règne une frise très riche de couleur et d'or: ce sont de petits personnages en bois sculpté, des chevaux, des paysages; de grandes inscriptions sur fond rouge décorent aussi les parois. Le caractère chinois est par lui-même décoratif, et les fils du Céleste-Empire aiment à avoir sous les yeux les préceptes, les maximes, les pensées de leurs anciens sages.

De belles lanternes pendent du plafond; derrière le banc d'honneur se déploie un grand paravent en bois de fer incrusté de nacre. Le banc d'honneur est une sorte de grande table basse entourée de trois côtés d'une petite balustrade; des coussins plats et fort durs sont posés sur le fond du banc en marbre de Yunar enchâssé dans le bois ramagé; deux petits traversins servent à appuyer les coudes, et la table, semblable à un large tabouret, qui sépare le visiteur de son hôte, est destinée à supporter les tasses et le thé. Un épais tapis en poil de chameau s'étend sur le sol; des tables et des chaises en marbre et en bois de fer, cette matière extrêmement dure que l'on travaille si merveilleusement à Canton, sont rangées sur deux lignes; deux grandes glaces, soutenues par des supports magnifiquement sculptés, complètent l'ameublement, ces cadres sont en métal un peu troubles peut-être. Il y en a de ronds comme la pleine lune, et qui font un effet pittoresque sur le dos d'un dragon, ou entre les griffes d'un chien fantastique. Dans les maisons plus riches s'élèvent encore au milieu de jardins, de très somptueux pavillons vers lesquels on monte par quelques marches qui leur servent de base. La balustrade en bois découpé qui entoure ce terre-plein est ordinairement ornementée du méandre bien connu que l'on nomme une grecque et que l'on devrait plutôt nommer une chinoise, car les Chinois bien avant les Étrusques et les Grecs ont orné leurs objets d'art de cette ligne décorative qu'ils savent varier à l'infini; on retrouve ces méandres qui, d'après les récits homériques décoraient le bouclier d'Agamemnon sur des vases de la dynastie des Chang, qui remonte beaucoup plus haut que le siège de Troie. L'ensemble de la construction de ces pavillons est du plus bel effet; ils sont construits dans cette architecture singulière dont l'élégante originalité est telle qu'elle était dans les siècles passés, telle qu'elle sera longtemps encore. La forme gracieusement concave des toitures recourbées aux angles, et qui s'appuient si légèrement sur des piliers de bois sans fûts ni chapiteaux, n'a-t-elle pas malgré la splendeur des ornements quelque chose de simple et de primitif? Son aspect ne fait-il pas songer à la tente fragile des premiers pasteurs?

Dans les jardins, verdoie et s'épanouit toute la flore Chinoise: des palmiers, des citronniers, des myrthes, toute une armée de cactus aux dards aigus, des cameliers, des magnolias et une infinie variété d'arbustes. Parmi les fleurs, huit ou dix espèces de lys d'une beauté incomparable; le Yeng-Yeng, cette fleur délicieuse, dont le parfum enivre; le splendide Melumbo que l'on considère comme une plante sacrée; l'olivier odorant; le dragonier pourpre qui fournit le bois de fer, l'amarante; le goyavier; le figuier banian au feuillage toujours vert; le Tchou-lau, dont la fleur très odorante sert à parfumer le thé de qualité inférieure; et par dessus tout, cette reine des fleurs que les poètes comparent aux femmes les plus belles, cette préférée des parterres chinois, à qui les jardiniers consacrent des soins infinis et qui l'emporte sur toutes ses rivales en beauté, en éclat, en ampleur: la pivoine arborescente!

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La maison, I The house, I

Les maisons chinoises, même les plus opulentes s'élèvent rarement au-dessus du rez-de-chaussée; elles se composent d'une suite de bâtiments séparés par des cours, et affectés chacun à un usage particulier. On construit le plus souvent sans fondations ni cave, sur de larges bases en moellons qui reposent immédiatement sur le sol; les murailles minces, hautes de 20 à 25 pieds, sont faites de briques d'une couleur cendrée: la brique vaut en Chine, suivant son volume, de 18 à 45 fr. le mille. Les tuiles qui recouvrent la toiture sont creuses comme des gouttières; on les pose d'abord sur le côté bombé en rangées longitudinales contiguës, puis les rainures plus ou moins larges que les rangées laissent entre elles, et qui pourraient donner passage à la pluie, sont recouvertes par d'autres tuiles placées en sens inverse; puis tous les matériaux disparaissent sous les peintures brillantes et les ornements. Les chevrons des toits dépassent toujours l'aplomb des murs et les dessous de ces avancements sont le prétexte de délicieuses décorations. C'est aux poutrelles entrecroisées sous ces auvents que l'on suspend les grosses lanternes ovoïdes sur lesquelles est écrit d'ordinaire le nom du propriétaire de la maison. Montons quelques marches, et pénétrons dans la salle de réception, après avoir admiré la superbe guirlande de feuillage et de fruits d'or qui encadre la porte jusqu'à mi-hauteur des chambranles; une légère balustrade ferme seule le seuil, et lorsqu'on l'a franchi, on se trouve dans un étroit péristyle qui communique directement avec le salon et semble en faire partie. Si vous êtes un visiteur de condition inférieure, vous ne dépasserez pas ce péristyle et c'est à genoux que vous devrez adresser la parole au maître du lieu qui, assis sur le banc d'honneur au fond de l'appartement, ne vous prêtera qu'une attention distraite et dédaigneuse; mais si vous êtes mandarin comme lui, il agira tout autrement: il se précipitera à votre rencontre, vous accablera de politesses et vous entraînera avec les marques de la plus vive affection vers le banc d'honneur, où il vous fera asseoir à sa gauche. On servira aussitôt le thé, les sucreries, les pipes, et tandis que l'hôte vous demandera avec le plus profond intérêt des nouvelles de toute votre glorieuse famille, vous pourrez examiner la salle de réception. Elle est assez vaste, éclairée sobrement par des châssis découpés à jour, où s'enchassera l'hiver, la coquille transparente d'un mollusque, «le placuna.» Un parfum délicat y flotte, qui émane des bois précieux dans lesquels sont taillés les meubles. Autour des murailles règne une frise très riche de couleur et d'or: ce sont de petits personnages en bois sculpté, des chevaux, des paysages; de grandes inscriptions sur fond rouge décorent aussi les parois. Le caractère chinois est par lui-même décoratif, et les fils du Céleste-Empire aiment à avoir sous les yeux les préceptes, les maximes, les pensées de leurs anciens sages.

De belles lanternes pendent du plafond; derrière le banc d'honneur se déploie un grand paravent en bois de fer incrusté de nacre. Le banc d'honneur est une sorte de grande table basse entourée de trois côtés d'une petite balustrade; des coussins plats et fort durs sont posés sur le fond du banc en marbre de Yunar enchâssé dans le bois ramagé; deux petits traversins servent à appuyer les coudes, et la table, semblable à un large tabouret, qui sépare le visiteur de son hôte, est destinée à supporter les tasses et le thé. Un épais tapis en poil de chameau s'étend sur le sol; des tables et des chaises en marbre et en bois de fer, cette matière extrêmement dure que l'on travaille si merveilleusement à Canton, sont rangées sur deux lignes; deux grandes glaces, soutenues par des supports magnifiquement sculptés, complètent l'ameublement, ces cadres sont en métal un peu troubles peut-être. Il y en a de ronds comme la pleine lune, et qui font un effet pittoresque sur le dos d'un dragon, ou entre les griffes d'un chien fantastique. Dans les maisons plus riches s'élèvent encore au milieu de jardins, de très somptueux pavillons vers lesquels on monte par quelques marches qui leur servent de base. La balustrade en bois découpé qui entoure ce terre-plein est ordinairement ornementée du méandre bien connu que l'on nomme une grecque et que l'on devrait plutôt nommer une chinoise, car les Chinois bien avant les Étrusques et les Grecs ont orné leurs objets d'art de cette ligne décorative qu'ils savent varier à l'infini; on retrouve ces méandres qui, d'après les récits homériques décoraient le bouclier d'Agamemnon sur des vases de la dynastie des Chang, qui remonte beaucoup plus haut que le siège de Troie. L'ensemble de la construction de ces pavillons est du plus bel effet; ils sont construits dans cette architecture singulière dont l'élégante originalité est telle qu'elle était dans les siècles passés, telle qu'elle sera longtemps encore. La forme gracieusement concave des toitures recourbées aux angles, et qui s'appuient si légèrement sur des piliers de bois sans fûts ni chapiteaux, n'a-t-elle pas malgré la splendeur des ornements quelque chose de simple et de primitif? Son aspect ne fait-il pas songer à la tente fragile des premiers pasteurs?

Dans les jardins, verdoie et s'épanouit toute la flore Chinoise: des palmiers, des citronniers, des myrthes, toute une armée de cactus aux dards aigus, des cameliers, des magnolias et une infinie variété d'arbustes. Parmi les fleurs, huit ou dix espèces de lys d'une beauté incomparable; le Yeng-Yeng, cette fleur délicieuse, dont le parfum enivre; le splendide Melumbo que l'on considère comme une plante sacrée; l'olivier odorant; le dragonier pourpre qui fournit le bois de fer, l'amarante; le goyavier; le figuier banian au feuillage toujours vert; le Tchou-lau, dont la fleur très odorante sert à parfumer le thé de qualité inférieure; et par dessus tout, cette reine des fleurs que les poètes comparent aux femmes les plus belles, cette préférée des parterres chinois, à qui les jardiniers consacrent des soins infinis et qui l'emporte sur toutes ses rivales en beauté, en éclat, en ampleur: la pivoine arborescente!