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Rapts et séquestrations, LA VICTIME EST COMME SUBJUGUÉE PAR SON RAVISSEUR

Que vous inspire le cas de cette jeune fille?

Professeur Charles-Siegfried Peretti. C'est une histoire exception nelle: d'abord parce que la jeune fille a été captive très longtemps, ensuite parce qu elle l'a été pendant une période clé : l'adolescence, le passage de l'enfance à l'âge adulte. Elle a vécu sous l'emprise d'un homme qui a usurpé la place des parents dans une relation qui reposait sur un mensonge. Car, pour pouvoir garder toutes ces années son emprise sur elle, le ravisseur lui a sûrement raconté des histoires. Par exemple que ses parents étaient morts, ou qu'elle était punie parce qu'elle avait mal agi ... C'est sur ces bases faussées que cette fillette a dû se construire. Détestait-elle cet homme?

Non, sans doute pas ... Dans un huis clos absolu comme celui-là un lien affectif se développe forcément. Pendant la moitié de la vie de cette enfant, cet homme a été son seul lien avec l'humanité. Tout ce que peut apporter une famille à un enfant -l'affection, l'équilibre - a fait défaut. Il est donc probable qu'elle ait subi le syndrome de Stockholm : la victime adopte un jugement déviant sur les actes que son ravisseur lui impose ou sur des actes que la morale réprouve. La victime est comme hypnotisée, subjuguée, séduite par son ravisseur. Séduite au sens étymologique du terme: se ducere, en latin, « amener à soi». Et là, il l'a amenée à lui tellement longtemps qu'elle a du être totalement séduite. Mais alors pourquoi a-t-elle fini par fuir?

On peut très bien imaginer qu'elle ait eu une prise de conscience partielle du mensonge, ou qu'il ait été violent avec elle, qu'à un moment il n'ait pas eu tout contrôle. Et puis, si elle faisait parfois des courses avec lui en ville, elle a pu s'apercevoir que d'autres gens ne vivaient pas comme elle, et vouloir voir comment c'était dehors. Va-t-elle s'en sortir? C'est difficile à dire. Il faut de toute façon qu'elle s'engage dans une longue psychothérapie. Elle doit verbaliser tout doucement ce qu'elle a vécu, et réaliser que les valeurs qui ont été construites pendant des années ne sont pas normales. En plus, elle doit faire le deuil de son ravisseur avant de pouvoir éprouver à nouveau de l'amour pour ses parents. Quelles traces va laisser ce long kidnapping?

Elle aura, évidemment, des séquelles importantes : crise émotionnelle, d'angoisse, voire dépression. Ce sera dur aussi pour ses parents. Ils devront accepter qu'elle est devenue adulte, qu'ils ont raté toute une partie du film. Accepter aussi qu'elle vive avec une cicatrice invisible : mais qui pourra se manifester à tout moment, par des réactions bizarres, violentes parfois. Il ne faudra pas qu'ils la surprotègent. Ce dont elle aura besoin, au contraire, c'est du contact des autres. Comment voyez-vous son avenir?

Le scénario optimiste, c'est qu'elle ait encore assez de ressources naturelles pour redonner un sens à sa vie, ce qui peut prendre deux ou trois ans. Le scénario pessimiste, c'est celui du repli sur soi, de la pérennisation du trouble et de la psychose. Au point de vue sexuel, sa relation aux hommes sera sans doute perturbée. On ne sait pas si elle a subi des sévices, mais, si c'est le cas, il y a un risque soit qu'elle refuse tout contact avec les hommes, soit qu'elle développe une perversion sexuelle.

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Que vous inspire le cas de cette jeune fille?

Professeur Charles-Siegfried Peretti. C'est une histoire exception nelle: d'abord parce que la jeune fille a été captive très longtemps, ensuite parce qu elle l'a été pendant une période clé : l'adolescence, le passage de l'enfance à l'âge adulte. Elle a vécu sous l'emprise d'un homme qui a usurpé la place des parents dans une relation qui reposait sur un mensonge. Car, pour pouvoir garder toutes ces années son  emprise sur elle, le ravisseur lui a sûrement raconté des histoires. Par exemple que ses parents étaient morts, ou qu'elle était punie parce qu'elle avait mal agi ... C'est sur ces bases faussées que cette fillette a dû se construire.

Détestait-elle cet homme?

                        Non, sans doute pas ... Dans un huis clos absolu comme celui-là un lien affectif se développe forcément. Pendant la moitié de la vie de cette enfant, cet homme a été son seul lien avec l'humanité. Tout ce que peut apporter une famille à un enfant -l'affection, l'équilibre - a fait défaut. Il est donc probable qu'elle ait subi le syndrome de Stockholm : la victime adopte un jugement déviant sur les actes que son ravisseur lui impose ou sur des actes que la morale réprouve. La victime est comme hypnotisée, subjuguée, séduite par son ravisseur. Séduite au sens éty­mologique du terme: se ducere, en latin, « amener à soi». Et là, il l'a ame­née à lui tellement longtemps qu'elle a du être totalement séduite.

          Mais alors pourquoi a-t-elle fini par fuir?

 

On peut très bien imaginer qu'elle ait eu une prise de conscience par­tielle du mensonge, ou qu'il ait été violent avec elle, qu'à un moment il n'ait pas eu tout contrôle. Et puis, si elle faisait parfois des courses avec lui en ville, elle a pu s'apercevoir que d'autres gens ne vivaient pas comme elle, et vouloir voir comment c'était dehors.

Va-t-elle s'en sortir?

 

C'est difficile à dire. Il faut de toute façon qu'elle s'engage dans une longue psychothérapie. Elle doit verbaliser tout doucement ce qu'elle a vécu, et réaliser que les valeurs qui ont été construites pendant des années ne sont pas normales. En plus, elle doit faire le deuil de son ravisseur avant de pouvoir éprouver à nouveau de l'amour pour ses parents.

Quelles traces va laisser ce long kidnapping?

 

Elle aura, évidemment, des séquelles importantes : crise émotionnelle, d'angoisse, voire dépression. Ce sera dur aussi pour ses parents. Ils  devront accepter qu'elle est devenue adulte, qu'ils ont raté toute une partie du film. Accepter aussi qu'elle vive avec une cicatrice invisible : mais qui pourra se manifester à tout moment, par des réactions bizarres, violentes parfois. Il ne faudra pas qu'ils la surprotègent. Ce dont elle aura besoin, au contraire, c'est du contact des autres.

      Comment voyez-vous son avenir?

 

Le scénario optimiste, c'est qu'elle ait encore assez de ressources natu­relles pour redonner un sens à sa vie, ce qui peut prendre deux ou trois ans. Le scénario pessimiste, c'est celui du repli sur soi, de la pérennisation du trouble et de la psychose. Au point de vue sexuel, sa relation aux hommes  sera sans doute perturbée. On ne sait pas si elle a subi des sévices, mais, si c'est le cas, il y a un risque soit qu'elle refuse tout contact avec les hommes, soit qu'elle développe une perversion sexuelle.