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L'île de la Possession

L'île de la Possession

De toute ma vie je ne m'étais jamais senti aussi nerveux que lorsque j'ai vue cette île sinistre qui émergeait lentement de la brume recouvrant l'océan. J'en étais à me demander si j'avais bien fait d'accepter ce poste de technicien en télécommunications. Lorsque j'avais décidé, il y a quelques mois, de poser ma candidature pour occuper ce poste sur la base scientifique « Alfred Faure » sur l'île de la possession, perdue dans l'océan Indien, en direction du Pôle Sud, je savais que le travail serait extrêmement exigeant. Le climat ici est très rude. L'île est exposée aux vents qui amènent régulièrement le froid du Pôle Sud et la pluie des vastes océans, et ce, trois cents jours par an en moyenne. Des pluies torrentielles et des tempêtes de neige et de grêle sont monnaie courante. Aucun arbre ne pousse sur cette île désolée, tant le vent est fort et constant. Sur ce sol volcanique, seule une végétation faite de mousse et d'herbe arrive à se développer, mais l'humidité est si importante que cette végétation est particulièrement dense. Le sol est tellement spongieux que vous avez l'impression de marcher sur un tapis posé sur l'eau, quand du moins vous ne vous enfoncez pas jusqu'à mi-cuisse dans des sortes de sables mouvants que l'on appelle souilles. De nombreux torrents, surgis de nulle part, dévalent les nombreuses montagnes. On ne peut d'ailleurs pas réellement parler de montagnes puisque le point culminant dépasse difficilement les mille mètres. Cependant, étant donné que la base se situe quasiment au niveau de la mer, le dénivelé reste très important et apparaît même plus impressionnant du fait des pentes très raides des moindres collines.

En ce matin froid et humide, je pouvais lire l'anxiété qui transpirait des visages de mes collègues, la même anxiété qu'ils devaient voir sur le mien d'ailleurs. Lorsque l'hélicoptère décolla et survola la baie, grouillante de manchots, ma nervosité disparue pour céder la place à une indescriptible excitation. Soudainement, un soleil étincelant transperça la chape de brouillard. Un vent hésitant dispersa la brume qui s'accrocha un instant aux sommets des plus hauts pics avant de se désintégrer complètement. Alors, le paysage lunaire s'illumina dans une explosion de couleurs. En quelques minutes, cette misérable île devint le paradis sur terre.

Finalement, l'hélicoptère se posa, et une douzaine d'êtres humains impatients et curieux s'agglutinèrent autour de la zone d'atterrissage pour nous accueillir. Comment pouvions-nous penser à ce moment-là, que, un an plus tard, nous pleurerions en quittant cette île si inhospitalière et attachante.

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L'île de la Possession Possession Island

De toute ma vie je ne m'étais jamais senti aussi nerveux que lorsque j'ai vue cette île sinistre qui émergeait lentement de la brume recouvrant l'océan. J'en étais à me demander si j'avais bien fait d'accepter ce poste de technicien en télécommunications. Lorsque j'avais décidé, il y a quelques mois, de poser ma candidature pour occuper ce poste sur la base scientifique « Alfred Faure » sur l'île de la possession, perdue dans l'océan Indien, en direction du Pôle Sud, je savais que le travail serait extrêmement exigeant. Le climat ici est très rude. L'île est exposée aux vents qui amènent régulièrement le froid du Pôle Sud et la pluie des vastes océans, et ce, trois cents jours par an en moyenne. Des pluies torrentielles et des tempêtes de neige et de grêle sont monnaie courante. Aucun arbre ne pousse sur cette île désolée, tant le vent est fort et constant. Sur ce sol volcanique, seule une végétation faite de mousse et d'herbe arrive à se développer, mais l'humidité est si importante que cette végétation est particulièrement dense. Le sol est tellement spongieux que vous avez l'impression de marcher sur un tapis posé sur l'eau, quand du moins vous ne vous enfoncez pas jusqu'à mi-cuisse dans des sortes de sables mouvants que l'on appelle souilles. De nombreux torrents, surgis de nulle part, dévalent les nombreuses montagnes. On ne peut d'ailleurs pas réellement parler de montagnes puisque le point culminant dépasse difficilement les mille mètres. Cependant, étant donné que la base se situe quasiment au niveau de la mer, le dénivelé reste très important et apparaît même plus impressionnant du fait des pentes très raides des moindres collines.

En ce matin froid et humide, je pouvais lire l'anxiété qui transpirait des visages de mes collègues, la même anxiété qu'ils devaient voir sur le mien d'ailleurs. Lorsque l'hélicoptère décolla et survola la baie, grouillante de manchots, ma nervosité disparue pour céder la place à une indescriptible excitation. Soudainement, un soleil étincelant transperça la chape de brouillard. Un vent hésitant dispersa la brume qui s'accrocha un instant aux sommets des plus hauts pics avant de se désintégrer complètement. Alors, le paysage lunaire s'illumina dans une explosion de couleurs. En quelques minutes, cette misérable île devint le paradis sur terre.

Finalement, l'hélicoptère se posa, et une douzaine d'êtres humains impatients et curieux s'agglutinèrent autour de la zone d'atterrissage pour nous accueillir. Comment pouvions-nous penser à ce moment-là, que, un an plus tard, nous pleurerions en quittant cette île si inhospitalière et attachante.