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Mondovino, MONDOVINO

" Quand bien même seriez-vous un incorruptible buveur d'eau plate, ne croyez pas que ce film va vous laisser indifférent… Non, le vin ne se réduit pas à une boisson alcoolisée issue de la fermentation du raisin, comme essaie de me le faire croire mon dictionnaire. Plus que le sang de la terre, il est le fruit d'une humanité, de son intelligence, de sa culture, de millénaires de labeur. Il a fermenté dans le cœur des hommes, s'est enrichi de leur sueur, de leur patience... Quel autre breuvage pourrait mieux refléter l'aventure de l'humanité? Parfaitement à la hauteur de son sujet, Mondovino est un documentaire long en bouche, large, généreux. Une ode à l'inventivité, à la subjectivité, qui distille une joie pure, presque enfantine, mais jamais mièvre. Jamais élitiste, ni pédant, c'est une manière subtile, gouleyante de décortiquer l'économie mondiale, les enjeux de pouvoir, les courants politiques qui l'animent… Ça commence très fort avec un sacré lascar nommé Michel Rolland : le Jules César des œnologues, le Spielberg du vin. Un génie dans son genre, un " visionnaire " qui a compris avant tout le monde la nécessité de produire un vin conforme aux goûts de l'immense majorité. Il ne fait pas du mauvais vin, il fait juste un produit standardisé, qui vous bluffe, sans défaut, sans surprise non plus… Charmeur, l'œil coquin, la bouche en cœur, la galéjade facile… On lui confierait volontiers ses arpents de vigne, si on en avait. À l'entendre, il serait une espèce de Messie du XXIe siècle, un ambassadeur de l'exception culturelle française, sillonnant le monde, transformant les déserts de pierres en vignes fructueuses et d'infâmes piquettes en grands vins voluptueux. Partout, il porte la bonne parole : " il faut oxygéner ". Et c'est avec ces mots-là que l'on commence à douter. Car, tel un médecin de Molière, il distribue cet unique conseil de manière un peu trop systématique, à chaque vigneron qui l'appelle, inquiet pour la santé de sa cuvée. S'il aime ce qu'il fait, il n'est pourtant qu'un pion consentant sur l'échiquier des multinationales (souvent amarrées au pays des Yankees : telle Mondavi), un faire valoir pour la bourse des actionnaires. Ces goulus qui réclament toujours plus sans se soucier des conséquences pour l'environnement, pour les hommes, et camouflent les salissures de leur conscience sous le tapis de la modernité… Plus ces suppôts du profit-roi pèsent dans la balance de la mondialisation, plus les vins suivent la mode, deviennent complaisants (voire conservateurs sous Reagan), frileux, sans âme… On s'y laisserait prendre, s'il n'y avait ceux d'en face, les irréductibles… Et nous voilà partis sur leurs traces, à travers le vaste monde. Ils se disent parfois conservateurs, mais sont en fait tranquillement radicaux dans leurs manières de résister aux tendances du marché ou à une " pensée unique ". Jonathan Nossiter recueille une brassée de témoignages magnifiques, paroles de libres-penseurs, tous plus fascinants et vivants les uns que les autres. Visions parfois teintées d'humour, parfois désabusées sur nos civilisations. " On a condamné les rois à la guillotine pour qu'ils n'aient plus le monopole du pouvoir et on a mis des grands distributeurs qui ont le monopole de la distribution ". Ils sont de tous bords, de toutes les classes sociales, de toutes tendances, même de celles qui vous hérisseront le plus. Mais qu'ils soient paysans ou aristocrates, le fait est là : ils résistent, refusent d'être formatés. C'est une lutte éthique, une bataille entre collaborateurs et résistants, entre ceux qui acceptent les conséquences de la globalisation au risque de se parjurer et ceux qui refusent de plier. Où est le bien? Où est le mal? Ce n'est jamais manichéen : le documentariste ne se met jamais à votre place. C'est à chacun de choisir son camp. On vous livre toutefois un indice, pour reconnaître le bon grain (de raisin) de l'ivraie : on ressemble non seulement à son vin, mais aussi à son chien. Et quand on a un chien qui pète et qui pue c'est suspect ! "

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" Quand bien même seriez-vous un incorruptible buveur d'eau plate, ne croyez pas que ce film va vous laisser indifférent… Non, le vin ne se réduit pas à une boisson alcoolisée issue de la fermentation du raisin, comme essaie de me le faire croire mon dictionnaire. Plus que le sang de la terre, il est le fruit d'une humanité, de son intelligence, de sa culture, de millénaires de labeur. Il a fermenté dans le cœur des hommes, s'est enrichi de leur sueur, de leur patience... Quel autre breuvage pourrait mieux refléter l'aventure de l'humanité? Parfaitement à la hauteur de son sujet, Mondovino est un documentaire long en bouche, large, généreux. Une ode à l'inventivité, à la subjectivité, qui distille une joie pure, presque enfantine, mais jamais mièvre. Jamais élitiste, ni pédant, c'est une manière subtile, gouleyante de décortiquer l'économie mondiale, les enjeux de pouvoir, les courants politiques qui l'animent…

Ça commence très fort avec un sacré lascar nommé Michel Rolland : le Jules César des œnologues, le Spielberg du vin. Un génie dans son genre, un " visionnaire " qui a compris avant tout le monde la nécessité de produire un vin conforme aux goûts de l'immense majorité. Il ne fait pas du mauvais vin, il fait juste un produit standardisé, qui vous bluffe, sans défaut, sans surprise non plus… Charmeur, l'œil coquin, la bouche en cœur, la galéjade facile… On lui confierait volontiers ses arpents de vigne, si on en avait. À l'entendre, il serait une espèce de Messie du XXIe siècle, un ambassadeur de l'exception culturelle française, sillonnant le monde, transformant les déserts de pierres en vignes fructueuses et d'infâmes piquettes en grands vins voluptueux. Partout, il porte la bonne parole : " il faut oxygéner ". Et c'est avec ces mots-là que l'on commence à douter. Car, tel un médecin de Molière, il distribue cet unique conseil de manière un peu trop systématique, à chaque vigneron qui l'appelle, inquiet pour la santé de sa cuvée. S'il aime ce qu'il fait, il n'est pourtant qu'un pion consentant sur l'échiquier des multinationales (souvent amarrées au pays des Yankees : telle Mondavi), un faire valoir pour la bourse des actionnaires. Ces goulus qui réclament toujours plus sans se soucier des conséquences pour l'environnement, pour les hommes, et camouflent les salissures de leur conscience sous le tapis de la modernité… Plus ces suppôts du profit-roi pèsent dans la balance de la mondialisation, plus les vins suivent la mode, deviennent complaisants (voire conservateurs sous Reagan), frileux, sans âme…

On s'y laisserait prendre, s'il n'y avait ceux d'en face, les irréductibles… Et nous voilà partis sur leurs traces, à travers le vaste monde. Ils se disent parfois conservateurs, mais sont en fait tranquillement radicaux dans leurs manières de résister aux tendances du marché ou à une " pensée unique ". Jonathan Nossiter recueille une brassée de témoignages magnifiques, paroles de libres-penseurs, tous plus fascinants et vivants les uns que les autres. Visions parfois teintées d'humour, parfois désabusées sur nos civilisations. " On a condamné les rois à la guillotine pour qu'ils n'aient plus le monopole du pouvoir et on a mis des grands distributeurs qui ont le monopole de la distribution ". Ils sont de tous bords, de toutes les classes sociales, de toutes tendances, même de celles qui vous hérisseront le plus. Mais qu'ils soient paysans ou aristocrates, le fait est là : ils résistent, refusent d'être formatés. C'est une lutte éthique, une bataille entre collaborateurs et résistants, entre ceux qui acceptent les conséquences de la globalisation au risque de se parjurer et ceux qui refusent de plier. Où est le bien? Où est le mal? Ce n'est jamais manichéen : le documentariste ne se met jamais à votre place. C'est à chacun de choisir son camp. On vous livre toutefois un indice, pour reconnaître le bon grain (de raisin) de l'ivraie : on ressemble non seulement à son vin, mais aussi à son chien. Et quand on a un chien qui pète et qui pue c'est suspect ! "