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La France pendant la deuxième guerre mondiale, La France foudroyée : La France en guerre

Quarante-huit heures après que la Wehrmacht eut franchi les frontières polonaises, le gouvernement français déclare la guerre à l'Allemagne, la décision prenant effet le dimanche 3 septembre à cinq heures. Ainsi, à peine plus de vingt ans après la fin d'un conflit qui devait être le dernier, la France se retrouve en guerre : les enfants auxquels leurs pères ont espéré épargner une épreuve semblable à la leur sont à leur tour jetés dans la tourmente. Quant aux aînés, beaucoup la connaissent pour la seconde fois : tous les généraux ont fait la Première Guerre, et avec eux des milliers d'officiers de carrière ou de réserve qui reprennent du service. La guerre n'est donc pas, pour un grand nombre de Français, une aventure inconnue : chacun retrouve des habitudes. Entre l'été 1914 et l'été 1939 il y a pourtant plus d'une différence qui engendre des changements de mentalité. En 1914, la guerre avait pris les Français par surprise: ils ne l'avaient pas vue venir. En 1939, ils s'y attendaient: ils en avaient vécu en 1938 comme la répétition générale. L'idée qu'on n'en finirait avec Hitler que par la guerre y avait préparé les esprits. La résistance à l'agression contre la Pologne était l'ultime occasion d'arrêter l'expansion du IIIème Reich: à céder une fois encore, la France se retrouverait tout à fait isolée; déjà, après l'annexion de l'Autriche, puis de la Bohême, l'Allemagne pesait deux fois plus lourd que la France. Mais, en 1914 on ignorait tout de la guerre moderne : le conflit ne pourrait être que bref, pensait-on, ce ne serait l'affaire que de quelques semaines, après quoi chacun retournerait à ses occupations du temps de paix. En 1939, on n'a plus de ces illusions; d'autant moins que la stratégie du haut commandement mise sur une guerre d'usure. Pourtant le contraste entre l'état d'esprit des deux mobilisations n'est pas aussi prononcé que les légendes le représentent: en 1914 l'enthousiasme était plus mitigé que ne le veulent les descriptions de régiments partant la fleur au fusil, et, en 1939, si les rappelés partent avec tristesse, elle n'exclut pas la résolution. La mobilisation s'effectue sans à-coups: l'alerte de1938 a servi à corriger les erreurs les plus criantes. La proportion des insoumis ne dépasse pas 1,5 %.

C'est ensuite que les attitudes divergent, car les choses ne se passent pas du tout comme on les attendait. On gardait le souvenir de la bataille des frontières, des terribles chocs frontaux des premières semaines qui avaient causé des pertes considérables et de l'invasion du territoire sur une grande profondeur. Or la guerre prend, à l'automne 1939, un tout autre tour; en dehors des quelques opérations limitées menées par des unités aguerries aux effectifs restreints dans le no man's land pour rectifier des saillants - en particulier dans la forêt de la Warndt -, les armées restent l'arme au pied. Les pertes sont réduites : quelques volontaires des corps francs qui ont sauté sur une mine, une unité, navale torpillée, quelques aviateurs abattus. La ligne Maginot préserve efficacement la France de l'invasion. L'effort de la nation pour se doter d'une cuirasse trouve sa justification. On se prépare à une guerre longue où l'important sera de durer. Cette forme de guerre insolite où les jours se passent à attendre reçoit bientôt une appellation qui la caractérise : c'est la « drôle de guerre ». Que l'expression ne prête pas à confusion! Drôle, cette guerre ne l'a été pour personne, pas plus que la captivité ne sera, en dépit du titre d'une des meilleures descriptions qu'elle ait inspirée, de grandes vacances. Cruelle pour les quelques milliers de mobilisés qui y ont perdu la vie, elle ne fut pas drôle pour les millions de Français arrachés par la mobilisation à leur famille et à leurs activités, qui passent un hiver rigoureux dans des cantonnements improvisés. Si encore ils avaient le sentiment que ces sacrifices servaient à rapprocher la fin de la guerre! Mais, semaine après semaine, l'inaction érode la résolution des premiers jours, le doute s'insinue, la « drôle de guerre» corrode les énergies et mine les volontés. On ne s'en avisera qu'au jour de l'épreuve, et il sera trop tard. On incriminera alors la drôle de guerre à laquelle on imputera la responsabilité de la défaite, et, comme on aura perdu de vue les raisons qui inspiraient cette stratégie, cette attente passive de l'initiative ennemie paraîtra tout bonnement absurde.

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Quarante-huit heures après que la Wehrmacht eut franchi les frontières polonaises, le gouvernement français déclare la guerre à l'Allemagne, la décision prenant effet le dimanche 3 septembre à cinq heures. Ainsi, à peine plus de vingt ans après la fin d'un conflit qui devait être le dernier, la France se retrouve en guerre : les enfants auxquels leurs pères ont espéré épargner une épreuve semblable à la leur sont à leur tour jetés dans la tourmente. Quant aux aînés, beaucoup la connaissent pour la seconde fois : tous les généraux ont fait la Première Guerre, et avec eux des milliers d'officiers de carrière ou de réserve qui reprennent du service. La guerre n'est donc pas, pour un grand nombre de Français, une aventure inconnue : chacun retrouve des habitudes.

 

Entre l'été 1914 et l'été 1939 il y a pourtant plus d'une différence qui engendre des changements de mentalité. En 1914, la guerre avait pris les Français par surprise: ils ne l'avaient pas vue venir. En 1939, ils s'y attendaient: ils en avaient vécu en 1938 comme la répétition générale. L'idée qu'on n'en finirait avec Hitler que par la guerre y avait préparé les esprits. La résistance à l'agression contre la Pologne était l'ultime occasion d'arrêter l'expansion du IIIème Reich: à céder une fois encore, la France se retrouverait tout à fait isolée; déjà, après l'annexion de l'Autriche, puis de la Bohême, l'Allemagne pesait deux fois plus lourd que la France.

 

Mais, en 1914 on ignorait tout de la guerre moderne : le conflit ne pourrait être que bref, pensait-on, ce ne serait l'affaire que de quelques semaines, après quoi chacun retournerait à ses occupa­tions du temps de paix. En 1939, on n'a plus de ces illusions; d'autant moins que la stratégie du haut commandement mise sur une guerre d'usure. Pourtant le contraste entre l'état d'esprit des deux mobilisations n'est pas aussi prononcé que les légendes le représentent: en 1914 l'enthousiasme était plus mitigé que ne le veulent les descriptions de régiments partant la fleur au fusil, et, en 1939, si les rappelés partent avec tristesse, elle n'exclut pas la résolution. La mobilisation s'effectue sans à-coups: l'alerte de1938 a servi à corriger les erreurs les plus criantes. La proportion des insoumis ne dépasse pas 1,5 %.

 

C'est ensuite que les attitudes divergent, car les choses ne se passent pas du tout comme on les attendait. On gardait le souvenir de la bataille des frontières, des terribles chocs frontaux des premières semaines qui avaient causé des pertes considérables et de l'invasion du territoire sur une grande profondeur. Or la guerre prend, à l'automne 1939, un tout autre tour; en dehors des quelques opérations limitées menées par des unités aguerries aux effectifs restreints dans le no man's land pour rectifier des saillants - en particulier dans la forêt de la Warndt -, les armées restent l'arme au pied. Les pertes sont réduites : quelques volontaires des corps francs qui ont sauté sur une mine, une unité, navale torpillée, quelques aviateurs abattus. La ligne Maginot préserve efficacement la France de l'invasion. L'effort de la nation pour se doter d'une cuirasse trouve sa justification. On se prépare à une guerre longue où l'important sera de durer.

 

Cette forme de guerre insolite où les jours se passent à attendre reçoit bientôt une appellation qui la caractérise : c'est la « drôle de guerre ». Que l'expression ne prête pas à confusion! Drôle, cette guerre ne l'a été pour personne, pas plus que la captivité ne sera, en dépit du titre d'une des meilleures descriptions qu'elle ait inspirée, de grandes vacances. Cruelle pour les quelques milliers de mobilisés qui y ont perdu la vie, elle ne fut pas drôle pour les millions de Français arrachés par la mobilisation à leur famille et à leurs activités, qui passent un hiver rigoureux dans des cantonnements improvisés. Si encore ils avaient le sentiment que ces sacrifices servaient à rapprocher la fin de la guerre! Mais, semaine après semaine, l'inaction érode la résolution des premiers jours, le doute s'insinue, la « drôle de guerre» corrode les énergies et mine les volontés. On ne s'en avisera qu'au jour de l'épreuve, et il sera trop tard. On incriminera alors la drôle de guerre à laquelle on imputera la responsabilité de la défaite, et, comme on aura perdu de vue les raisons qui inspiraient cette stratégie, cette attente passive de l'initiative ennemie paraîtra tout bonnement absurde.