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l'histoire de France, Des Marcheurs Incomparables

Aujourd'hui des rallyes traversent le désert. Mais ces voitures, ces motos, ces camions bariolés par des slogans publicitaires croisent parfois dans le même désert des caravanes composées seulement d'hommes et de bêtes. La télévision vous les montre, ces tribus qui, sur le dos de leurs chameaux, se déplacent sans cesse, allant, d'oasis en oasis, à la recherche d'eau et de nourriture. Ce sont les nomades. Ils sont aujourd'hui une exception dans le monde. Au temps de la préhistoire, pendant des centaines de milliers d'années, il n'a rien existé d'autre que des nomades. Mais ceux-là n'avaient pas la chance de disposer de chameaux. C'est à pied qu'ils marchaient. Regardez ce cortège silencieux progressant dans la forêt, où les pas des animaux ont tracé une sorte de chemin. Les hommes ouvrent la marche, avec leurs arcs et leurs massues, scrutant les fourrés pour faire face aux dangers qui pourraient se présenter. Derrière eux, les femmes portent les provisions. Autour d'elles, des enfants courent et rient, ou bien se traînent en pleurant d'épuisement. Pas de vieillards : on les abandonne dès qu'ils ne peuvent plus suivre. Il y a des semaines que l'on voyage. Chaque soir, à l'étape, les hommes allument de grands feux et veillent. Les femmes préparent le campement, cuisent la nourriture, soignent les enfants. Demain, on repartira. On ne s'arrêtera que lorsque le chef se croira parvenu au site idéal, près d'une rivière où l'on pourra pêcher, non loin d'une forêt où l'on poursuivra le gibier et où l'on cueillera les fruits qui s'y trouvent, ainsi que les plantes propres à la consommation. Ces gens ne peuvent survivre qu'en se déplaçant sans cesse. Ils ne s'arrêtent que l'hiver, quand il fait trop froid. Alors ils recherchent des grottes dans lesquelles ils s'installent durant quelques mois. Si vous passez par Nice, vous pourrez, en longeant la mer sous le mont Boron, apercevoir l'entrée des grottes du Lazaret. Là, il y a 150 000 ans, dans une cavité de 40 mètres de long sur 20 mètres de large, ont longtemps vécu des hommes qui mesuraient de 1,50 m à 1,65 m. Ils y ont connu les grands froid d'une période glacière. Pour se protéger, ils ont construit dans la grotte elle-même une tente en peaux de bête, dans laquelle ils allumaient des feux. En outre, pour couper le vent glacé, ils ont élevé un mur à l'entrée de la grotte. On ne peut guère parler de confort. Songez que la fumée ne s'évacuait que très difficilement : les accès de toux devaient être fréquents ! Mais ces hommes disposaient leurs lits d'algues séchées autour des feux : au moins ils avaient chaud. Ces hommes-là étaient déjà fort habiles. Ils étaient capables de fabriquer des poinçons en os, des poignards et des casse-tête, des pics, des hachoirs, des couteaux. Cette grotte du Lazaret n'a été habitée, chaque année, que de novembre à avril. Imaginez la joie des hommes, des femmes, des enfants de cette tribu quand ils voient venir le printemps. Non seulement ils vont pouvoir s'évader de leur abri enfumé, mais surtout ils vont retrouver une nourriture plus riche et plus variée. Assez de viande ou de poissons séchés ! Vive les fruits et les légumes frais ! Donc, ils se remettent en marche, redevenus nomades pour découvrir d'autres zones giboyeuses ou riches en végétaux comestibles. Ces groupes en éternel cheminement sont peu nombreux : une quinzaine de personnes tout au plus. S'ils étaient en plus grand nombre, le gibier aussi bien que le produit de la cueillette deviendraient très vite insuffisants. Fatalement, au sein de ces groupes, tout le monde est parent.

Voici le fait le plus extraordinaire peut-être de ce temps-là : ces familles pouvaient se déplacer tout au long d'une vie entière sans en rencontrer une autre. Pendant des centaines de milliers d'années, la population du territoire qui allait devenir la France n'a pas dépassé 20 000 habitants. Oui, 20 000 seulement ! Souvenez-vous que la France, aujourd'hui comptent environ 60 millions d'habitants. Comment, dans ces conditions, les familles nomades en auraient-elles croisé d'autres ? L'exception, justement, c'était la rencontre. Une tribu s'avance, une fois de plus, dans la forêt. Le spectacle est un peu lassant, il dure depuis si longtemps ! Pardonnez-moi, mais je ne puis pas réinventer la Préhistoire.

Ce qui rompt la monotonie, c'est que ces hommes qui marchent toujours sont fort différents de ceux qui les ont précédés. L'homme, au long des millénaires, se transformait physiquement. C'était toujours l'homme, mais du fait que son aspect n'était plus le même, de nouvelles races apparaissaient. Les savants leur ont donné des noms fort compliqués : Homo Habilis, Pithécanthrope, Homo Erectus. Observez leur silhouette, telle qu'il est possible de les reconstituer d'après leurs squelettes : il est évident qu'ils ne nous ressemblent guère. Il est non moins certain qu'ils évoluent peu à peu vers l'apparence qui est la nôtre aujourd'hui. Cette nouvelle tribu qui s'avance, sans se méfier de ce qui l'attend, vous pourriez à première vue supposer qu'il s'agit de grands singes. Il eût été fâcheux que vous le leur disiez. Vous les auriez fâchés. Regardez-les donc mieux que cela : malgré une tête énorme à la mâchoire proéminente, une face emmêlée de poils, ce sont des hommes.

Nous connaissons même leur nom. Les savants les ont appelés : hommes de Neandertal.

Donc, ils trottinent sue la piste forestière, ces messieurs et dames Neandertal. Pas trop mécontents d'eux. Il y a de quoi : apparus dans nos contrées il y a 80 000 ans environ, ils ont pulvérisé les connaissances de leurs prédécesseurs. Les premiers, ils ont su tailler les pierres en pointe – les fameux silex – ils les ont assujetties à des bâtons de bois, inventant la lance ou la sagaie. Pour couper les arbres, ils disposent de haches en pierre.

Bien mieux, quand M . Neandertal meurt, on l'enterre. Ses prédécesseurs se contentaient d'abandonner leurs morts aux chacals et aux vautours. Cette négligence est oubliée : on creuse pour le défunt Neandertal une fosse, on y allonge le corps, la tête vers le soleil couchant, les jambes repliées. On cale le crâne avec des pierres, on le recouvre de plaques d'os. On dépose même auprès de lui des quartiers de viande, des outils et des objets familiers. Pas de doute : on veut l'aider à poursuivre son voyage. Ces messieurs et dames Neandertal croient que la mort du corps n'est pas la fin de tout et qu'il existe en nous un esprit qui peut lui survivre. Il y a pourtant fort à parier que, ce jour-là, la petite famille Neandertal ne songe pas à la mort. Il fait beau. Dans quelques jours on aura gagné un nouveau terrain de chasse.

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Aujourd'hui des rallyes traversent le désert. Mais ces voitures, ces motos, ces camions bariolés par des slogans publicitaires croisent parfois dans le même désert des caravanes composées seulement d'hommes et de bêtes.

La télévision vous les montre, ces tribus qui, sur le dos de leurs chameaux, se déplacent sans cesse, allant, d'oasis en oasis, à la recherche d'eau et de nourriture.

Ce sont les nomades. Ils sont aujourd'hui une exception dans le monde. Au temps de la préhistoire, pendant des centaines de milliers d'années, il n'a rien existé d'autre que des nomades. Mais ceux-là n'avaient pas la chance de disposer de chameaux. C'est à pied qu'ils marchaient.

Regardez ce cortège silencieux progressant dans la forêt, où les pas des animaux ont tracé une sorte de chemin. Les hommes ouvrent la marche, avec leurs arcs et leurs massues, scrutant les fourrés pour faire face aux dangers qui pourraient se présenter. Derrière eux, les femmes portent les provisions. Autour d'elles, des enfants courent et rient, ou bien se traînent en pleurant d'épuisement. Pas de vieillards : on les abandonne dès qu'ils ne peuvent plus suivre.

Il y a des semaines que l'on voyage. Chaque soir, à l'étape, les hommes allument de grands feux et veillent. Les femmes préparent le campement, cuisent la nourriture, soignent les enfants. Demain, on repartira. On ne s'arrêtera que lorsque le chef se croira parvenu au site idéal, près d'une rivière où l'on pourra pêcher, non loin d'une forêt où l'on poursuivra le gibier et où l'on cueillera les fruits qui s'y trouvent, ainsi que les plantes propres à la consommation. Ces gens ne peuvent survivre qu'en se déplaçant sans cesse. Ils ne s'arrêtent que l'hiver, quand il fait trop froid. Alors ils recherchent des grottes dans lesquelles ils s'installent durant quelques mois.

Si vous passez par Nice, vous pourrez, en longeant la mer sous le mont Boron, apercevoir l'entrée des grottes du Lazaret. Là, il y a 150 000 ans, dans une cavité de 40 mètres de long sur 20 mètres de large, ont longtemps vécu des hommes qui mesuraient de 1,50 m à 1,65 m. Ils y ont connu les grands froid d'une période glacière. Pour se protéger, ils ont construit dans la grotte elle-même une tente en peaux de bête, dans laquelle ils allumaient des feux. En outre, pour couper le vent glacé, ils ont élevé un mur à l'entrée de la grotte. On ne peut guère parler de confort. Songez que la fumée ne s'évacuait que très difficilement : les accès de toux devaient être fréquents ! Mais ces hommes disposaient leurs lits d'algues séchées autour des feux : au moins ils avaient chaud.

Ces hommes-là étaient déjà fort habiles. Ils étaient capables de fabriquer des poinçons en os, des poignards et des casse-tête, des pics, des hachoirs, des couteaux. Cette grotte du Lazaret n'a été habitée, chaque année, que de novembre à avril. Imaginez la joie des hommes, des femmes, des enfants de cette tribu quand ils voient venir le printemps. Non seulement ils vont pouvoir s'évader de leur abri enfumé, mais surtout ils vont retrouver une nourriture plus riche et plus variée. Assez de viande ou de poissons séchés ! Vive les fruits et les légumes frais ! Donc, ils se remettent en marche, redevenus nomades pour découvrir d'autres zones giboyeuses ou riches en végétaux comestibles. Ces groupes en éternel cheminement sont peu nombreux : une quinzaine de personnes tout au plus. S'ils étaient en plus grand nombre, le gibier aussi bien que le produit de la cueillette deviendraient très vite insuffisants. Fatalement, au sein de ces groupes, tout le monde est parent.

Voici le fait le plus extraordinaire peut-être de ce temps-là : ces familles pouvaient se déplacer tout au long d'une vie entière sans en rencontrer une autre. Pendant des centaines de milliers d'années, la population du territoire qui allait devenir la France n'a pas dépassé 20 000 habitants. Oui, 20 000 seulement ! Souvenez-vous que la France, aujourd'hui comptent environ 60 millions d'habitants.

Comment, dans ces conditions, les familles nomades en auraient-elles croisé d'autres ? L'exception, justement, c'était la rencontre. Une tribu s'avance, une fois de plus, dans la forêt. Le spectacle est un peu lassant, il dure depuis si longtemps ! Pardonnez-moi, mais je ne puis pas réinventer la Préhistoire.

Ce qui rompt la monotonie, c'est que ces hommes qui marchent toujours sont fort différents de ceux qui les ont précédés. L'homme, au long des millénaires, se transformait physiquement. C'était toujours l'homme, mais du fait que son aspect n'était plus le même, de nouvelles races apparaissaient.

Les savants leur ont donné des noms fort compliqués : Homo Habilis, Pithécanthrope, Homo Erectus. Observez leur silhouette, telle qu'il est possible de les reconstituer d'après leurs squelettes : il est évident qu'ils ne nous ressemblent guère. Il est non moins certain qu'ils évoluent peu à peu vers l'apparence qui est la nôtre aujourd'hui. Cette nouvelle tribu qui s'avance, sans se méfier de ce qui l'attend, vous pourriez à première vue supposer qu'il s'agit de grands singes. Il eût été fâcheux que vous le leur disiez. Vous les auriez fâchés. Regardez-les donc mieux que cela : malgré une tête énorme à la mâchoire proéminente, une face emmêlée de poils, ce sont des hommes.

Nous connaissons même leur nom. Les savants les ont appelés : hommes de Neandertal.

Donc, ils trottinent sue la piste forestière, ces messieurs et dames Neandertal. Pas trop mécontents d'eux. Il y a de quoi : apparus dans nos contrées il y a 80 000 ans environ, ils ont pulvérisé les connaissances de leurs prédécesseurs. Les premiers, ils ont su tailler les pierres en pointe – les fameux silex – ils les ont assujetties à des bâtons de bois, inventant la lance ou la sagaie. Pour couper les arbres, ils disposent de haches en pierre.

Bien mieux, quand M . Neandertal meurt, on l'enterre. Ses prédécesseurs se contentaient d'abandonner leurs morts aux chacals et aux vautours. Cette négligence est oubliée : on creuse pour le défunt Neandertal une fosse, on y allonge le corps, la tête vers le soleil couchant, les jambes repliées. On cale le crâne avec des pierres, on le recouvre de plaques d'os. On dépose même auprès de lui des quartiers de viande, des outils et des objets familiers. Pas de doute : on veut l'aider à poursuivre son voyage. Ces messieurs et dames Neandertal croient que la mort du corps n'est pas la fin de tout et qu'il existe en nous un esprit qui peut lui survivre. Il y a pourtant fort à parier que, ce jour-là, la petite famille Neandertal ne songe pas à la mort. Il fait beau. Dans quelques jours on aura gagné un nouveau terrain de chasse.