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l'histoire de France, La révolution de 1789 – la patrie en danger

C'est à la tribune de la Convention qu'un jeune député a un jour bondi. Il est taillé en athlète, mais ce qui frappe, c'est son visage d'une laideur écrasante: quand il était petit, un taureau lui a arraché d'un coup de corne la lèvre supérieure; un autre taureau lui a écrasé le nez. La petite vérole est venue ensuite labourer ce visage déjà si éprouvé. Élu député de Paris, ce jeune homme s'appelle Danton. Il ne prend pas la parole, il la conquiert. Il gronde, il tonne, il rugit. Tous ceux qui l'ont approché ont été frappés par sa fabuleuse énergie, sa façon de parler âpre et pleine de fougue. Ce jour-là, ce qu'il réclame de la Convention, pour faire face au danger mortel que court la patrie, ce sont des mesures radicales. Il hurle: - De l'audace! Encore de l'audace! Toujours de l'audace et la France est sauvée! C'est que les Prussiens, alliés aux Autrichiens, sont entrés eux aussi en France. Ils ont pris Verdun. La route de Paris est ouverte. À cette nouvelle, d'ailleurs, les Parisiens ont envahi les prisons où sont incarcérés de nombreux prisonniers, soupçonnés d'être des adversaires de la Révolution. - Les ennemis, s'écrie-t-on, vont les délivrer dès qu'ils seront à Paris! Alors, pour qu'ils ne soient pas libérés, une foule irresponsable va s'adonner à d'impitoyables massacres. Aux prisons de l'Abbaye, des Carmes, de la Force, du Châtelet, de la Conciergerie, de Bicêtre, de la Salpêtrière, on tue aveuglément, sans jugement, et n'importe qui. Des femmes aussi bien que des hommes. Des pauvres comme des riches. Des jeunes gens et des vieillards. On assomme, on égorge, on poignarde. Vous devez vous souvenir que de tels excès, même s'ils s'expliquent, ne peuvent être excusés. Tous les hommes, même coupables, ont droit à la justice. Les victimes des massacres de septembre n'ont pas eu droit aux juges qui, à n'en pas douter, auraient découvert beaucoup d'innocents parmi elles. Danton, en tout cas, a été écouté. Pour arrêter l'ennemi, la nation tout entière se mobilise. Sur les places publiques, à l'ombre du drapeau tricolore, on ouvre des bureaux de recrutement pour l'armée où des milliers de jeunes gens viennent se faire inscrire. Ce sont les volontaires de 1792.

Assis devant une table bien garnie et entouré d'une cour d'officiers à sa dévotion, un général prussien est secoué par un rire dont il semble qu'il ne s'arrêtera pas. Il a grande allure, il faut le reconnaître, le duc de Brunswick qui commande l'armée du roi de Prusse. Ce qui le réjouit tant, c'est que l'armée française - on vient de le lui annoncer - marche contre lui. - L'armée française! Pauvres Français! Ils ont déjà été battus à plate couture par les Autrichiens. Pour Brunswick, il ne s'agit que d'une armée de savetiers et de loqueteux. Il est vrai qu'en ce qui concerne l'habillement, il voit juste : ce n'est pas par leur tenue que brillent les Français. Brunswick se taille auprès des officiers un dernier succès en jurant que la nouvelle devise des Français est vaincre ou courir!

Vraiment? Le 20 septembre 1792, Brunswick va se voir administrer la preuve du contraire. C'est à Valmy, auprès d'une colline que domine un moulin à vent, qu'il va rencontrer ces « pauvres Français ». L'artillerie des Prussiens ouvre le feu mais - ô surprise ! - les canons des « loqueteux» leur répondent. Et ils se révèlent supérieurs à l'artillerie prussienne. Le général français Kellermann ôte son chapeau surmonté d'un panache bleu, blanc, rouge. Il le pique au bout de son épée et le brandit. Il s'élance en avant de ses troupes en hurlant : - Vive la nation! Les Prussiens refluent en désordre.

Brunswick, qui ne rit plus, reconnaît sa défaite. Il ordonne le soir même la retraite.

Un grand écrivain allemand, Goethe, qui avait suivi les troupes de Brunswick un peu comme le ferait aujourd'hui un correspondant de guerre, va écrire: De ce lieu et de ce jour date une nouvelle époque de l'histoire du monde. Il a voulu dire par là que, pour la première fois, l'armée d'un peuple avait vaincu l'armée d'un roi. La neige tombe dru sur Paris. Le jour n'est pas encore levé et déjà une longue file d'attente s'allonge aux portes de la boucherie. Ces gens vont rester là, tremblant de froid, pendant des heures. Lorsque leur tour viendra d'entrer dans la boutique, le boucher ne leur vendra, lorsqu'ils lui auront remis un « bon» délivré par la municipalité, qu'une toute petite part de viande. Après quoi, ces mêmes gens iront faire une autre queue, aussi longue, aussi pénible, à la porte d'une boulangerie. Un autre « bon» et ils emporteront un bien léger morceau de pain.

C'est un fait, les Français ont faim. Les prix montent. Ceux qui possèdent du blé aiment mieux le cacher que le vendre. Les paysans refusent la nouvelle monnaie, les assignats qui perdent chaque mois de leur valeur. Pourquoi? Parce que la France est en guerre. Après des victoires qui ont permis à nos armées d'occuper la Belgique, d'entrer à Nice et en Savoie et d'envisager, avec Danton, que la France occupe bientôt ses « frontières naturelles» sur les Alpes et le Rhin, la chance a tourné. La mort de Louis XVI a exaspéré les rois contre la France révolutionnaire. L'Angleterre, les États allemands et italiens, l'Espagne, le Portugal, la Hollande ont pris les armes contre nous: presque toute l'Europe! Comment un seul pays, la France, va-t-il pouvoir faire face à tant d'ennemis à la fois ? Au cri de La liberté ou la mort, la France entière se mobilise. Ce qui se produit, c'est peut-être l'effort le plus gigantesque de toute notre Histoire. Sans cesse il faut trouver de nouveaux soldats. Au mois de février 1793, on mobilise 300000 hommes. Au mois d'août on procède à la levée en masse, appelant tous les Français en âge de se battre à sauver la patrie. En Vendée et en Bretagne éclate en même temps une formidable révolte contre le gouvernement de la République. Les paysans refusent d'aller se battre aux frontières. Ils mettent des nobles comme Charette à leur tête et forment une armée rebelle.

La Convention doit donc se battre à la fois contre les étrangers qui nous attaquent de toutes parts et contre ceux que l'on appelle les Vendéens au sud de la Loire, les Chouans au nord de la Loire ou, d'une façon générale, les Blancs. Contre ceux-ci la Convention va devoir envoyer des armées - les Bleus - qui vont manquer cruellement aux frontières.

Vendéens et Chouans vont affronter les Bleus en des combats sans merci. Les Bleus vont parfois se livrer à des massacres inexcusables - les colonnes infernales - cependant que leurs adversaires procéderont à des vengeances impitoyables. Souvenez-vous qu'une guerre civile est la pire de toutes. On dit à juste titre qu'elle est fratricide parce qu'elle se livre entre ces frères que sont les citoyens d'un même pays. Désormais, ce qui prime, c'est la guerre. On arrache les grilles des monuments et on s'empare des cloches des églises pour les fondre et en faire des canons. On enlève aux particuliers leurs chevaux, leurs manteaux - et même leurs chaussures - pour équiper la troupe. Les moyens de transport sont réquisitionnés pour les besoins des armées. C'est pour cela que les denrées ne circulent plus, que le pain et la viande sont si rares. Ce qui sévit, c'est le marché noir: les bouchers vendent officiellement les maigres parts prévues par la loi et cèdent en secret à un prix énorme les meilleurs morceaux à ceux qui peuvent les payer. Dans les rangs du peuple, contre les fraudeurs, la colère monte. Partout on exige contre eux des mesures extrêmes. Le journaliste Hébert, qui édite le Père Duchesne, tonne contre « les voleurs », Quand on apprend que les défenses françaises sont presque partout enfoncées, que Valenciennes est prise, que Toulon est livrée aux Anglais, la colère du peuple grandit encore. Elle devient de l'exaspération. On accuse les royalistes de faire le jeu de nos ennemis. On réclame « des têtes », c'est-à-dire la mort pour les traîtres. La Convention va répondre par quelque chose de terrible: la Terreur.

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C'est à la tribune de la Convention qu'un jeune député a un jour bondi. Il est taillé en athlète, mais ce qui frappe, c'est son visage d'une laideur écrasante: quand il était petit, un taureau lui a arraché d'un coup de corne la lèvre supérieure; un autre taureau lui a écrasé le nez. La petite vérole est venue ensuite labourer ce visage déjà si éprouvé. Élu député de Paris, ce jeune homme s'appelle Danton.

Il ne prend pas la parole, il la conquiert. Il gronde, il tonne, il rugit. Tous ceux qui l'ont approché ont été frappés par sa fabu­leuse énergie, sa façon de parler âpre et pleine de fougue.

Ce jour-là, ce qu'il réclame de la Convention, pour faire face au danger mortel que court la patrie, ce sont des mesures radi­cales. Il hurle:

- De l'audace! Encore de l'audace! Toujours de l'audace et la France est sauvée!

C'est que les Prussiens, alliés aux Autrichiens, sont entrés eux aussi en France. Ils ont pris Verdun. La route de Paris est ouverte. À cette nouvelle, d'ailleurs, les Parisiens ont envahi les prisons où sont incarcérés de nombreux prisonniers, soupçonnés d'être des adversaires de la Révolution.

- Les ennemis, s'écrie-t-on, vont les délivrer dès qu'ils seront à Paris!

Alors, pour qu'ils ne soient pas libérés, une foule irresponsable va s'adonner à d'impitoyables massacres. Aux prisons de l'Abbaye, des Carmes, de la Force, du Châtelet, de la Conciergerie, de Bicêtre, de la Salpêtrière, on tue aveuglément, sans jugement, et n'importe qui. Des femmes aussi bien que des hommes. Des pauvres comme des riches. Des jeunes gens et des vieillards. On assomme, on égorge, on poignarde. Vous devez vous souvenir que de tels excès, même s'ils s'expliquent, ne peuvent être excusés. Tous les hommes, même coupables, ont droit à la justice. Les victimes des massacres de septembre n'ont pas eu droit aux juges qui, à n'en pas douter, auraient découvert beaucoup d'innocents parmi elles.

Danton, en tout cas, a été écouté. Pour arrêter l'ennemi, la nation tout entière se mobilise. Sur les places publiques, à l'ombre du drapeau tricolore, on ouvre des bureaux de recrute­ment pour l'armée où des milliers de jeunes gens viennent se faire inscrire. Ce sont les volontaires de 1792.

 

Assis devant une table bien garnie et entouré d'une cour d'officiers à sa dévotion, un général prussien est secoué par un rire dont il semble qu'il ne s'arrêtera pas. Il a grande allure, il faut le reconnaître, le duc de Brunswick qui commande l'armée du roi de Prusse. Ce qui le réjouit tant, c'est que l'armée fran­çaise - on vient de le lui annoncer - marche contre lui.

- L'armée française!

Pauvres Français! Ils ont déjà été battus à plate couture par les Autrichiens. Pour Brunswick, il ne s'agit que d'une armée de savetiers et de loqueteux.

Il est vrai qu'en ce qui concerne l'habillement, il voit juste : ce n'est pas par leur tenue que brillent les Français.

Brunswick se taille auprès des officiers un dernier succès en jurant que la nouvelle devise des Français est vaincre ou courir!

Vraiment? Le 20 septembre 1792, Brunswick va se voir admi­nistrer la preuve du contraire. C'est à Valmy, auprès d'une colline que domine un moulin à vent, qu'il va rencontrer ces « pauvres Français ».

L'artillerie des Prussiens ouvre le feu mais - ô surprise ! - les canons des « loqueteux» leur répondent. Et ils se révèlent supé­rieurs à l'artillerie prussienne. Le général français Kellermann ôte son chapeau surmonté d'un panache bleu, blanc, rouge. Il le pique au bout de son épée et le brandit. Il s'élance en avant de ses troupes en hurlant :

- Vive la nation!

Les Prussiens refluent en désordre.

Brunswick, qui ne rit plus, reconnaît sa défaite. Il ordonne le soir même la retraite.

Un grand écrivain allemand, Goethe, qui avait suivi les troupes de Brunswick un peu comme le ferait aujourd'hui un correspondant de guerre, va écrire: De ce lieu et de ce jour date une nouvelle époque de l'histoire du monde.

 

Il a voulu dire par là que, pour la première fois, l'armée d'un peuple avait vaincu l'armée d'un roi.

 

La neige tombe dru sur Paris. Le jour n'est pas encore levé et déjà une longue file d'attente s'allonge aux portes de la boucherie.

 

Ces gens vont rester là, tremblant de froid, pendant des heures. Lorsque leur tour viendra d'entrer dans la boutique, le boucher ne leur vendra, lorsqu'ils lui auront remis un « bon» délivré par la municipalité, qu'une toute petite part de viande.

 

Après quoi, ces mêmes gens iront faire une autre queue, aussi longue, aussi pénible, à la porte d'une boulangerie. Un autre « bon» et ils emporteront un bien léger morceau de pain.

 

C'est un fait, les Français ont faim. Les prix montent. Ceux qui possèdent du blé aiment mieux le cacher que le vendre. Les pay­sans refusent la nouvelle monnaie, les assignats qui perdent chaque mois de leur valeur. Pourquoi? Parce que la France est en guerre. Après des victoires qui ont permis à nos armées d'occuper la Belgique, d'entrer à Nice et en Savoie et d'envisager, avec Danton, que la France occupe bientôt ses « frontières naturelles» sur les Alpes et le Rhin, la chance a tourné. La mort de Louis XVI a exaspéré les rois contre la France révolutionnaire. L'Angleterre, les États allemands et italiens, l'Espagne, le Portugal, la Hollande ont pris les armes contre nous: presque toute l'Europe!

 

Comment un seul pays, la France, va-t-il pouvoir faire face à tant d'ennemis à la fois ? Au cri de La liberté ou la mort, la France entière se mobilise. Ce qui se produit, c'est peut-être l'effort le plus gigantesque de toute notre Histoire. Sans cesse il faut trou­ver de nouveaux soldats. Au mois de février 1793, on mobilise 300000 hommes. Au mois d'août on procède à la levée en masse, appelant tous les Français en âge de se battre à sauver la patrie.

 

En Vendée et en Bretagne éclate en même temps une formi­dable révolte contre le gouvernement de la République. Les pay­sans refusent d'aller se battre aux frontières. Ils mettent des nobles comme Charette à leur tête et forment une armée rebelle.

La Convention doit donc se battre à la fois contre les étrangers qui nous attaquent de toutes parts et contre ceux que l'on appelle les Vendéens au sud de la Loire, les Chouans au nord de la Loire ou, d'une façon générale, les Blancs. Contre ceux-ci la Convention va devoir envoyer des armées - les Bleus - qui vont manquer cruellement aux frontières.

 

Vendéens et Chouans vont affronter les Bleus en des combats sans merci. Les Bleus vont parfois se livrer à des massacres inex­cusables - les colonnes infernales - cependant que leurs adver­saires procéderont à des vengeances impitoyables. Souvenez-­vous qu'une guerre civile est la pire de toutes. On dit à juste titre qu'elle est fratricide parce qu'elle se livre entre ces frères que sont les citoyens d'un même pays.

 

Désormais, ce qui prime, c'est la guerre. On arrache les grilles des monuments et on s'empare des cloches des églises pour les fondre et en faire des canons. On enlève aux particuliers leurs chevaux, leurs manteaux - et même leurs chaussures - pour équiper la troupe. Les moyens de transport sont réquisitionnés pour les besoins des armées. C'est pour cela que les denrées ne circulent plus, que le pain et la viande sont si rares.

Ce qui sévit, c'est le marché noir: les bouchers vendent offi­ciellement les maigres parts prévues par la loi et cèdent en secret à un prix énorme les meilleurs morceaux à ceux qui peuvent les payer.

Dans les rangs du peuple, contre les fraudeurs, la colère monte. Partout on exige contre eux des mesures extrêmes. Le journaliste Hébert, qui édite le Père Duchesne, tonne contre « les voleurs »,

Quand on apprend que les défenses françaises sont presque partout enfoncées, que Valenciennes est prise, que Toulon est livrée aux Anglais, la colère du peuple grandit encore. Elle devient de l'exaspération. On accuse les royalistes de faire le jeu de nos ennemis. On réclame « des têtes », c'est-à-dire la mort pour les traîtres.

 

La Convention va répondre par quelque chose de terrible: la Terreur.