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En Chine, L'art dramatique, II

L'art dramatique, II

Dans les grandes villes—à Pékin, à Shanghaï—il y a des théâtres fixes, et ils sont aménagés le mieux du monde pour l'agrément et le bien-être des spectateurs. À Pékin, ils sont groupés dans le même quartier et les comédiens logent presque tous dans la rue des théâtres.

Quand on y passe, le matin, on les entend déclamer leurs rôles, ou imiter—à n'en plus finir—le chant du coq. Il paraît qu'il n'y a rien de tel pour fortifier la voix. Les théâtres, n'ont, en général, pas de troupe spéciale. Des troupes ambulantes jouent dans les uns et dans les autres; le plus souvent, elles courent la province et sont engagées par les préfets ou par les bonzes, à l'occasion d'une fête populaire, soit dans les maisons de riches particuliers qui veulent faire suivre l'agrément d'un festin par le plaisir plus noble d'une représentation. Dans ce cas, à l'instant où l'on se met à table, on voit entrer cinq acteurs, richement vêtus, qui se prosternent. Puis l'un d'eux, présente au maître de la maison un livre qui contient en lettres d'or les titres d'une soixantaine de pièces que la troupe est en état de représenter sur-le-champ: on fait circuler cette liste et le convive le plus qualifié désigne la pièce qui lui plaît le mieux. Toute œuvre dramatique, disent les maîtres, doit avoir un sens sérieux et un but moral. Une pièce sans moralité est ridicule... Elles doivent présenter les plus nobles enseignements de l'histoire, à ceux qui ne savent pas lire, montrer des peintures, vraies ou supposées de la vie, capables d'inspirer la pratique de la vertu. Une pièce immorale est un crime. Son auteur est puni, dans l'autre monde, et son expiation dure aussi longtemps que sa pièce est jouée sur la terre. Déjà au huitième siècle, dans le palais de Tchane-Ganne, l'empereur Mine-Roan avait fait édifier un superbe théâtre, dans lequel il joua en personne. Il s'occupait lui-même de sa troupe d'acteurs, dirigeant les études et les répétitions. Elles avaient lieu le plus souvent, dans une partie des parcs qu'on appelait «l'Enclos des poiriers.» C'est pour cela que l'on nomme encore quelquefois les acteurs, «Les élèves de l'enclos des poiriers.» L'engouement de la cour pour l'art théâtral gagna vite les hauts fonctionnaires et les particuliers. Chacun voulut avoir son théâtre privé, ses acteurs et sa troupe de danseurs. Cela devint bientôt une folie qu'il fallut réprimer; on limita entre autres, le nombre des danseurs que chacun, selon son rang, fut autorisé à entretenir: on en accorda soixante-quatre à l'empereur, trente-six aux princes de sang, seize aux ministres, huit aux membres de la noblesse, deux seulement aux lettrés et aux particuliers. Les ballets, à cette époque, étaient extrêmement magnifiques et portaient des titres pompeux. Ils s'intitulaient: Le Portique des nuées; Le Grand tourbillon; La Cadencée, qui est, paraît-il, la plus gracieuse danse de l'antiquité; La Grande Dynastique, celle-ci lente et grave; La Bienfaisante; la Guerrière; la danse de la Plume, du Bouclier, des Banderoles bariolées. Il y en avait une, celle du Dragon, dont les évolutions avaient lieu dans l'eau, et une autre, où figurait un taureau avec lequel le danseur luttait en le tenant par les cornes. Cet empereur, Mine-Roan, qui ne dédaigna pas de monter sur les planches, est considéré encore aujourd'hui, comme le patron du théâtre et des comédiens. Dans les coulisses, sa statuette est toujours placée sur un petit autel où l'encens brûle toujours. Chaque acteur, avant d'entrer en scène, salue pieusement l'image de celui qui, il y a dix siècles, leur fut bienveillant, et protégea les artistes. Et rien n'est plus touchant que l'expression de cette reconnaissance qui ne finit jamais.

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L'art dramatique, II Dramatic art, II

Dans les grandes villes—à Pékin, à Shanghaï—il y a des théâtres fixes, et ils sont aménagés le mieux du monde pour l'agrément et le bien-être des spectateurs. À Pékin, ils sont groupés dans le même quartier et les comédiens logent presque tous dans la rue des théâtres.

Quand on y passe, le matin, on les entend déclamer leurs rôles, ou imiter—à n'en plus finir—le chant du coq. Il paraît qu'il n'y a rien de tel pour fortifier la voix. Les théâtres, n'ont, en général, pas de troupe spéciale. Des troupes ambulantes jouent dans les uns et dans les autres; le plus souvent, elles courent la province et sont engagées par les préfets ou par les bonzes, à l'occasion d'une fête populaire, soit dans les maisons de riches particuliers qui veulent faire suivre l'agrément d'un festin par le plaisir plus noble d'une représentation. Dans ce cas, à l'instant où l'on se met à table, on voit entrer cinq acteurs, richement vêtus, qui se prosternent. Puis l'un d'eux, présente au maître de la maison un livre qui contient en lettres d'or les titres d'une soixantaine de pièces que la troupe est en état de représenter sur-le-champ: on fait circuler cette liste et le convive le plus qualifié désigne la pièce qui lui plaît le mieux. Toute œuvre dramatique, disent les maîtres, doit avoir un sens sérieux et un but moral. Une pièce sans moralité est ridicule... Elles doivent présenter les plus nobles enseignements de l'histoire, à ceux qui ne savent pas lire, montrer des peintures, vraies ou supposées de la vie, capables d'inspirer la pratique de la vertu. Une pièce immorale est un crime. Son auteur est puni, dans l'autre monde, et son expiation dure aussi longtemps que sa pièce est jouée sur la terre. Déjà au huitième siècle, dans le palais de Tchane-Ganne, l'empereur Mine-Roan avait fait édifier un superbe théâtre, dans lequel il joua en personne. Il s'occupait lui-même de sa troupe d'acteurs, dirigeant les études et les répétitions. Elles avaient lieu le plus souvent, dans une partie des parcs qu'on appelait «l'Enclos des poiriers.» C'est pour cela que l'on nomme encore quelquefois les acteurs, «Les élèves de l'enclos des poiriers.» L'engouement de la cour pour l'art théâtral gagna vite les hauts fonctionnaires et les particuliers. Chacun voulut avoir son théâtre privé, ses acteurs et sa troupe de danseurs. Cela devint bientôt une folie qu'il fallut réprimer; on limita entre autres, le nombre des danseurs que chacun, selon son rang, fut autorisé à entretenir: on en accorda soixante-quatre à l'empereur, trente-six aux princes de sang, seize aux ministres, huit aux membres de la noblesse, deux seulement aux lettrés et aux particuliers. Les ballets, à cette époque, étaient extrêmement magnifiques et portaient des titres pompeux. Ils s'intitulaient: Le Portique des nuées; Le Grand tourbillon; La Cadencée, qui est, paraît-il, la plus gracieuse danse de l'antiquité; La Grande Dynastique, celle-ci lente et grave; La Bienfaisante; la Guerrière; la danse de la Plume, du Bouclier, des Banderoles bariolées. Il y en avait une, celle du Dragon, dont les évolutions avaient lieu dans l'eau, et une autre, où figurait un taureau avec lequel le danseur luttait en le tenant par les cornes. Cet empereur, Mine-Roan, qui ne dédaigna pas de monter sur les planches, est considéré encore aujourd'hui, comme le patron du théâtre et des comédiens. Dans les coulisses, sa statuette est toujours placée sur un petit autel où l'encens brûle toujours. Chaque acteur, avant d'entrer en scène, salue pieusement l'image de celui qui, il y a dix siècles, leur fut bienveillant, et protégea les artistes. Et rien n'est plus touchant que l'expression de cette reconnaissance qui ne finit jamais.